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Le blog de Niandou Ibrahim
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29 janvier 2021

Stéréotypes et conflits -

 

Gabdi Songhoï

"Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix" (préambule, Acte constitutif de l'UNESCO)

 

L’histoire de l’humanité montre que les conflits les plus meurtriers ont été suscités ou nourris essentiellement par un ou des stéréotypes. On constate aujourd’hui une montée vertigineuse des stéréotypes dans notre pays. Elle est actuellement une des plus grandes menaces pour la paix au Niger. Dans une dynamique de prévention de tout emballement axé sur ce phénomène, il y a un besoin important et urgent de renforcer les analyses et l’éducation populaire autour de cette cause vérifiée de violence. Mais qu’est-ce donc et comment se manifeste le stéréotype ? Comment nous en prémunir aux fins de maintenir et renforcer la paix sous nos cieux ?

Le stéréotype est cette façon d’attribuer le même qualificatif, la même caractéristique à un groupe de personnes. Par exemple, « Les militants de tel parti politique sont violents » ; « les étudiants de tels faculté sont des idiots » ; « les adeptes de telles religions des fourbes » ;  etc. Le stéréotype, c’est donc le fait de croire ou de vouloir faire croire que tous les éléments d’un groupe sont identiques et méritent le même traitement. Le stéréotype gomme les différences qui existent entre les membres du groupe. « Ils sont tous les mêmes » est l’expression du stéréotype la plus répandue que l’on entend souvent. Selon le dictionnaire, le stéréotype vient du latin « typus » désignant un modèle, une image, précédé du préfixe stéréo, lui-même dérivé du grec ancien « stereós » (selon www.linternaute.fr  ).

Au-delà de l’origine étymologique, il est pertinent de se poser la question des causes, des raisons qui poussent à l’émission des stéréotypes.

Il est possible qu’un individu sous le coup d’une émotion, d’un choc, extrapole un vécu ou un témoignage, attribue la même force ou la même faiblesse à un groupe entier. Il est possible que l’individu se construise une opinion basée sur le traumatisme d’un fait heureux ou malheureux. On voit ainsi des gens dire « je ne retournerai plus jamais à tel endroit parce que ses habitants sont des voleurs ou des méchants » ; « Je déménagerai volontiers à tel lieu parce que les habitants y sont gentils »…

 La paresse intellectuelle peut également entrainer les humains à répéter ce qui se dit continuellement dans son entourage et dans son histoire.  A force d’entendre les parents ressasser un préjugé sur un groupe ; à force de lire sur les réseaux sociaux ou d’entendre à la télévision à longueur de journée qu’une catégorie donnée de la société a un défaut précis, ancré, immuable, des jeunes finissent par s’approprier durablement de cette opinion. Pire ils pourront la réémettre voire construire des actes sur cette fondation erronée et ces stigmatisations. 

 

"Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix" (préambule, Acte constitutif de l'UNESCO)

Il demeure cependant que plus souvent, les stéréotypes partent de constructions délibérées et manipulatrices. « Les individus ont besoin de développer un sentiment d’appartenance à un ou plusieurs groupes. Le phénomène est à double sens ; d’une part, nous avons tendance à accentuer notre identification à un groupe de référence, par souci de repères, de structures et d’identité. D’autre part, le regard que nous portons sur les autres groupes est marqué par les différences qui nous éloignent. Exagérer les similitudes à l’intérieur d’un groupe accentue les différences entre les groupes»  (Duperray Charlotte, 2009: http://www.slate.fr/story/ne-me-pr%C3%A9jugez-pas

Quoique non systématique, les humains ont donc une propension à « embellir » leur groupe et  à « noircir » les autres groupes afin de se renforcer et de s’identifier. Malheureusement, cette attitude humaine banalisée, acceptée produit les affrontements, les guerres, les génocides. Le conditionnement de l’opinion fini par produire des monstruosités du type que l’humanité connait de plus en plus ( en Europe en milieu du siècle précédent, dans les grands-lacs, en Afrique du sud, dans les Balkans, en Côte d’ivoire, au Soudan, en Centrafrique, au Nigeria,  etc).  

Paradoxalement, il s’avère que les solutions préventives des conflits d’intolérance de diversité (les stéréotypes, les préjugés, les discriminations, les stigmatisations) sont portées par les mêmes forces et les mêmes potentialités. En effet, toutes les expériences de conflits « claniques » montrent que :

- Le passage à l’acte est suscité par des leaders mus par des intérêts politiques, économiques, géopolitiques avoués ou non. De même, toutes les fois où les communautés humaines ont pu éviter les drames, malgré les tendances malheureuses, c’est qu’il y a eu des leaders qui ont su saisir les opportunités du moment pour arrêter la descente aux enfers : Ce fut le cas de Nelson Mandela et d’autres que l’histoire n’énumère pas beaucoup malgré les mérites.  Une  réaction vigoureuse et massive des pouvoirs d’opinions et une meilleure valorisation de notre patrimoine culturelle pourront atténuer les risques liés aux dérives des stéréotypies. Les pouvoirs d’opinion s’entendent ici aussi bien par les autorités formelles que l’ensemble des leaders d’opinion à tous les niveaux. Le cousinage à plaisanterie s’assoit sur les stéréotypes, transforme cette tare (le stéréotype) en un instrument d’immunisation, de prévention de conflit. C’est un exemple, à conforter, d’une technologie sociale au service de l’harmonie dans la diversité.  

-Les ressources de communication ont joué un rôle déterminant dans les embrasements récents (Radio milles collines au Rwanda, les réseaux sociaux dans les cas en cours). Nous savons que ces mêmes réseaux sociaux et les échelles élargies de diffusion des médias traditionnelles sont des opportunités de construire la paix.

A un niveau individuel, chaque citoyen a la responsabilité immense de contribuer à nourrir la paix. Cela se fera, entre autres :

  • En réfléchissant chacun pour soi-même. Ce que nous disent les médias, les leaders religieux, les leaders politiques, les leaders économiques, l’ami-e, le/la collègue, le/la voisine est très souvent une opinion. Il est crucial pour l’être humain doté de sa propre raison de savoir prendre toutes ces opinions (avec leurs contradictions, leurs diversités, leur similitudes, leurs erreurs possibles etc), les digérer pour se faire sa propre idée.
  • En évitant les décisions et actes basées sur les émotions. Il est toujours contre-productif de se laisser guider par la peur, la colère dans ce nous entreprenons.
  • En analysant, avant coup, ce que l’on « partage » sur les réseaux sociaux. Du fait qu’il est très facile de « partager » (en fait « transférer ») les posts/messages/images que l’on reçoit des « ami-es » sur Facebook, Twitter, WatsApp, on constate que les fausses informations, les images discriminantes, les appels à la haine pullulent et circulent sans peine. Nous pouvons chacun contribuer à la paix en vérifiant un peu la véracité, la crédibilité et la portée des messages que nous véhiculons.

Par Niandou Ibrahim  http://nomaniandou.afrikblog.com/

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  • "Le surdoué" n'est pas que l'enfant de son géniteur. Dans les cultures humaines, l'éducation de l'enfant, futur membre actif de la communauté, devrait être de l'espace des responsabilités collectives. C'est là que commence l'humanisme.
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